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Le blog de la prospective

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CONTRASTES OU ANTAGONISMES DANS UN ENSEMBLE DE CHINES


Vous l'avez remarqué : les "papiers" sur la Chine se multiplient depuis quelques mois, à croire que la chape de plomb, qui s'était abattue sur le sujet, s'est soudain envolée. Pendant plusieurs années, en effet, les lobbys de toutes sortes ont joué pour qu'on ne parle pas de la Chine : le business avant tout. Et puis, quelques joint-ventures ont explosé, des procès pour contrefaçons ont été portés à la connaissance du public, des grèves dans les manufactures chinoises sont apparues sur le net, de nombreux grognements paysans se sont fait entendre, de nombreuses catastrophes écologiques ont été présentées au grand jour, et la crise de 2008 est passée par là. L'Empire se fissure-t'il ? Nous travaillons à une réflexion en profondeur sur le propos. Voici quelques éléments de notre analyse. Nos sources sont toujours les mêmes : les écrits confortés oralement par les praticiens sur place.


En fait, le bilan contrasté de l'économie et de la Société chinoises est globalement conforme à ce que l'on a constaté dans d'autres pays en développement. Mais ici, on parle d'un continent et d'un régime politique oligarchique, les comparaisons sont donc difficiles. C'est ainsi que nous avons compris pourquoi les autorités chinoises tiennent tant à leur qualification de pays "en voie de développement" : ceci masque les difficultés et les échecs. Les grèves, les contrefaçons, les joint-ventures contrariées, les grognements paysans, les drames écologiques ne datent pas d'aujourd'hui. Ce qui est par contre criant, c'est cette dualité sur laquelle s'est installé le pays-continent.

Tout d'abord, l'antagonisme villes/campagnes est explosif à l'image de 2 mondes qui cohabitent tout en s'ignorant. Bien sûr, près de 100 millions de paysans se sont déplacés ou ont été  déplacés vers les villes pour satisfaire les besoins en main d'oeuvre dans les usines. Bien sûr, des voies de communication ont été construites pour faciliter les connexions. Bien sûr, la planification a apporté de la technique et du modernisme dans les contrées reculées. Pourtant ces 2 mondes se regardent et ne se reconnaissent pas.

En second lieu, l'antagonisme jeunes/vieux est impressionnant. Le nerf de la guerre c'est la vitesse. Cette vitesse de changement que réprouvent les anciens par culture, par sagesse, par opposition tout simplement. De très nombreuses familles se sont déchiquetées à cause de cette vitesse : les jeunes veulent aller vite et n'hésitent pas à renier le passé. Deux sociétés se sont ainsi créées et les  clivages sont insurmontables.

En troisième lieu, l'antagonisme instruits/non-instruits fait des ravages. Ne nous trompons cependant pas : l'instruction est dans les gênes du peuple chinois. Mais l'Occident est au  centre du fossé. Des valeurs millénaires sont clouées au pilori. Ces valeurs qui ont traversé guerres et régimes politiques. Pour beaucoup d'anciens, fidèles à la tradition, fréquenter l'université c'est changer de nationalité.

En quatrième lieu, l'antagonisme apparatchiks/non-apparatchiks est latent. Sournoisement. Il est bien loin le temps où Révolution Culturelle et Grand Bon en Avant  ralliaient les suffrages. On en est là parce que le Pouvoir a besoin de brassards pour concrétiser son oeuvre. Dans la rue, dans les ateliers, la méfiance est de mise entre "élus" et "non-élus".

Ces antagonismes freinent l'essor souhaité et créent un ensemble de Chines, qui n'a rien à voir avec des différences régionales. Dans tout autre pays, plus modestement dimensionné, l'explosion aurait opéré depuis longtemps. Le nationalisme exacerbé a ici ralenti l'implosion. La notion de "pays en voie de développement" justifie des sacrifices sachant qu'on ne voit toujours pas de date programmée pour le "Grand Soir". On peut donc continuer à fermer des usines par milliers au nom d'économies énergétiques, déplacer des millions de citoyens au nom de la préservation des eaux, augmenter temporairement les salaires de 75% au nom de la fin des grèves qui font désordre, abandonner des peuples entiers au nom de la conscience industrielle, piller des savoirs étrangers au nom de l'essor économique, exiler temporairement des cerveaux au nom de la rapidité mondialiste, acheter l'Afrique au nom de sécurisations énergétique et alimentaire, polluer le reste du Monde au nom de la revanche productiviste, financer la dette américaine au nom de l'exportation forcée de produits manufacturés, "règlementer" l'information au nom de la préservation des acquis.


Il n'y a pas besoin d'être devin pour comprendre que cette situation ne durera pas éternellement. C'est sciemment que nous avons placé l'être humain au centre de nos réflexions. Parce qu'aucun autre pays au Monde ne peut prétendre et justifier d'un passé aussi conséquent.

Cet article traite du bilan sociétal contrasté de la Chine qui conduit le pays vers une situation économique prochaine difficile. © 2010

Article 15