QUELLE GOUVERNANCE DEMAIN DANS L’ENTREPRISE ? (1° PARTIE)
Vous remarquerez que les articles dans la presse sur la génération des dirigeants dits soixante-huitards sont plutôt rares. Est-ce par hasard ou est-ce volontaire, on ne le sait pas officiellement ! A l'heure du changement naturel de génération à la tête des entreprises, il est intéressant de se pencher sur le contenu des deux styles de gouvernance pour comprendre certains enjeux de demain. Précisons que les grandes tendances qui suivent ne sont pas une généralité, et heureusement...
Voilà près de 25 ans que la France économique est gouvernée par les patrons de la génération 68. Ceux-ci constituent officiellement la première escouade de décideurs formés à l'université. Ils ont vécu les Trente Glorieuses et à ce titre plutôt "tâté de la soie que de la toile émeri". Certains d'être une "nouvelle vague", ils ont abordé l'Entreprise en conquérants avec en visée permanente le "vieux" dirigeant qui incarne le passé - et l'autorité -. Les anecdotes sont nombreuses sur leurs escarmouches diverses et variées avec leurs chefs. Dans une Société en pleine mutation des valeurs vers le superficiel, ils ont surfé en permanence pour éviter les embûches et monter à tout prix dans la hiérarchie. Leur but n'est pas tant le pouvoir que la suppression de tout ce qui existait avant.
Arrivés au sommet, ils ont commencé par faire place nette. On leur doit officiellement les nombreux licenciements des "anciens" à la fin des années 80 et au début des années 90 : il s'agissait pour le moins de supprimer toute référence au passé. Car l'avenir c'est eux, même le présent est envoyé aux pertes et profits. Leur gestion est donc soixante-huitarde : une organisation plutôt livrée à l'initiative individuelle, un aménagement du temps de travail pour plus de liberté, des avantages sociaux catégoriels, une tendance à l'innovation, une ouverture sur le Monde, plus de services moins de production,...Cette "indéniable libéralisation" de l'Entreprise s'est accompagnée d'un délitage de la fonction de dirigeant. Peu amène à la donne humaine, préférant déléguer tout en souhaitant tout savoir, privilégiant la fidèlisation du client au gain de clientèle, encourageant l'idée personnelle sans jamais la concrétiser, le dirigeant soixante-huitard est en fait un vrai conservateur, n'aimant pas prendre une décision qui pourrait bousculer son confort personnel. Celui-ci se traduit par la culture du temps libre, le goût immodéré pour les voyages, le désintérêt total pour la chose juridique, la sacralisation de la marque comme patrimoine de l'Entreprise, le peu d'empressement à s'engager dans la société civile, et ...la nécessité de disposer de revenus confortables. On retiendra enfin son peu d'intérêt majoritaire pour la pérennité de son entreprise. C'est sans doute pour cela qu'il privilégie le Fonds de Pension américain au repreneur français lors d'une transmission.
Depuis 2-3 ans arrive une nouvelle génération de dirigeants. Portés souvent plus jeunes que leurs aînés vers des responsabilités, ils ont eux aussi une formation dite supérieure. Mais cette fois reçue dans les écoles plus que dans les universités. Et cette différence fait la différence : l'Entreprise est avant tout un centre de profit. Celui-ci doit être immédiat grâce à une navigation à vue dans un univers mondialisé. Evacués l'histoire de l'Entreprise, son patrimoine, ses marques, son savoir-faire, voire même son activité. Bienvenue au royaume de la finance. Cette fois tout est organisé depuis le sommet, hiérarchisé à l'extrême, ne laissant pas de place à l'initiative personnelle. Et n'allez pas médire sur le système ou vous aurez affaire au service communication. Car la nouvelle Entreprise "lave plus blanc que blanc" : marketing, sourcing (ou comment acheter au meilleur endroit au meilleur coût), externalisation de certaines tâches, chasse aux coûts, production standard (ou il est nécessaire d' augmenter la marge), gestion humaine (ou l'épanouissement personnel passe par les résultats), legal daily (ou le juridique envahit le quotidien),... Le nouveau dirigeant aime cet univers blanc qu'il cultive depuis l'école. Il le partage avec ses anciens collègues de promotion qui entretiennent avec lui un système clanique d'embauche. Car ici la priorité est au diplôme pas au vécu, quelque soit l'âge. Il aime s'engager un peu dans la vie civile parce qu'il a besoin de considération. Il n'est pourtant pas attaché à son entreprise puisqu'il veille en permanence grâce à son clan sur son prochain job. A 40-45 ans il croit en ce qu'il fait comme une mission divine puisqu'elle est écrite d
On l'aura compris : ces deux races de patrons ne sont pas issues du même moule. Ils ont cependant en commun la fidèlité à leurs principes appris. Ne considérez pas cet article comme étant caustique. Car ce que nous prépare l'Economie va se charger de changer rapidement ce que vous venez de lire. Tout au plus inquiétez-vous de ce que l'on peut apprendre dans certaines écoles pour futurs dirigeants. En tout cas on en reparle dans une deuxième partie...